Alexis Jenni : "Il y a quelque chose d'humiliant à se faire distribuer des aliments pas mangeables"

Le romancier Alexis Jenni ©AFP - Joël Saget
Le romancier Alexis Jenni ©AFP - Joël Saget
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Le romancier Alexis Jenni, lauréat du prix Goncourt en 2011, a enquêté sur la précarité alimentaire pour l'ouvrage "Ensemble pour mieux se nourrir", co-écrit avec le journaliste Frédéric Denhez et publié chez Actes Sud. Il est l'invité d'Hélène Roussel à 7h50.

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Alexis Jenni a écrit Ensemble pour mieux se nourrir avec Frédéric Denhez a paru aux éditions Actes Sud. Une enquête sur la précarité alimentaire : "En France, nous sommes dans un pays d'abondance, à part dans des cas de clochardisation totale, les gens ne meurent pas de faim. C'est plutôt la qualité de ce qui est disponible qui pose problème", explique-t-il, notant que les produits de l'agro-industrie vendus en grande distribution, qui se retrouvent dans les banques alimentaires. "Ce sont des produits accessibles mais qui ne sont pas de bonne qualité diététique. Ils posent des problèmes d'obésité, de diabète, qui sont extrêmement plus présents dans les classes populaires", explique l'écrivain, qui est également prof de SVT. Dans les distributions de colis alimentaires, la crise du Covid a accentué le nombre de bénéficiaires, qui avaient perdu leurs petits emplois, note Alexis Jenni. 

Aujourd'hui, la loi interdit aux grandes surfaces de jeter leurs invendus. "Heureusement que cette redistribution existe, mais on peut se poser la question de ce qu'il y a dans ces colis : on voit une grande quantité d'aliments qui sont diététiquement tout à fait désastreux, qui sont invendus et donc distribués", explique Alexis Jenni, ajoutant : "Des gens qui n'ont pas de moyens sont dégoûtés par cela, et parfois refusent. On se dit que quand on a faim il vaut mieux cela que rien, mais il y a quelque chose d'humiliant à se faire distribuer des choses qui ne sont pas vraiment mangeables". 

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Dans ce livre, il est question d'initiatives de personnes en situation de précarité pour mieux manger. "Nous sommes allés voir des expériences très différentes : à Pau par exemple, dans un petit village, les gens se sont révoltés contre ces produits qu'on leur distribuait et ont décidé de faire un jardin partagé. Ils ont reçu un terrain prêté par la mairie, et collectivement, ils ont créé un jardin, pour faire des paniers de légumes".

"On n'est plus dans un caritatif distributif, mais il y a quelque chose de "l'empowerment" (...) Ces initiatives permettent de se réouvrir, de refaire des choses collectives."

A terme, quel est le but ? "Il y a énormément de solutions pour toutes sortes de problèmes, c'est aussi une façon de modifier les circuits de distribution, de changer le rapport à l'achat. Il y a des centaines de ces expériences en France".

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