Comment les journalistes des Echos utilisent l'IA générative au quotidien
Après plusieurs mois de tests, la rédaction du quotidien économique dispose depuis janvier de plusieurs fonctionnalités d'IA, certaines directement intégrées à leur CMS.
La rédaction des Echos intègre depuis janvier dans son CMS des fonctionnalités d'IA générative pour quelques tâches très précises : proposition de titres ou de chapos, production de résumés ou de "points à retenir", proposition des titres et de posts sur mesure pour chaque réseau social dont notamment LinkedIn. "Le journaliste peut demander à l'IA générative de lui suggérer des variantes à son titre ou à son chapo, mais à condition de les avoir déjà rédigés. Les fonctionnalités ne peuvent être utilisées que si l'article est déjà écrit", précise Benoît Georges, journaliste de la rédaction et, depuis septembre également, chef de projet IA.
Tout journaliste qui le souhaite peut se servir de ces fonctionnalités d'IA générative, mais personne n'est en revanche obligé. "Nous ne nous sommes pas fixés d'objectifs ni en termes d'adoption, ni de mesure de gains de productivité", explique Violaine Degas, directrice du digital du pôle Les Echos et Thématiques. "Nous sommes en phase de formation et d'expérimentation."D'autres fonctionnalités seront ajoutées dans les prochains mois, dont la suggestion de légendes de photos et la recommandation d'articles de type ("lire aussi").
Adhésion des journalistes
Nos interlocuteurs ne tiennent pas de statistiques, mais observent de la curiosité et une certaine adhésion de la part des journalistes. "Lors d'une séance de formation réunissant une vingtaine de journalistes, la moitié m'a déclaré y avoir recours, mais surtout pour dépanner, pas de manière systématique. Nous formons toute la rédaction à l'IA, toutes celles et ceux qui le souhaitent. Environ 70% des journalistes s'y sont inscrits", explique Benoît Georges.
Pour s'assurer d'un processus transparent, le journal a mis en place le mois de mai dernier une dizaine d'ateliers avec tous les métiers de la rédaction (rédaction, iconographie, secrétariat de rédaction, édition web, community management, etc.) pour identifier les tâches qui pourraient être automatisées grâce à l'IA générative et leur niveau de priorité. "Il fallait que tout ce processus se fasse de manière collaborative entre la direction numérique, le département data et la rédaction des Echos", précise Violaine Degas.
Quant à la qualité des résultats, cela dépend de l'appréciation de chacun : "On peut trouver que le titre ou le chapô suggérés ne répondent pas tout à fait à ses attentes, mais il ne sera jamais faux car l'IA n'est sollicitée que sur l'article qui est rédigé ", précise Violaine Degas. Ce qui n'est pas le cas d'un outil basé sur l'IA récemment mis en place pour le service iconographie, qui transforme des images en tableau : "Dans ce cas, la réponse de l'IA est fausse une fois sur dix, ce qui renforce l'importance de rester très vigilant en la matière et tout contrôler avec un regard humain. Nous avons signé une charte éditoriale : rien n'est publié sans contrôle humain", ajoute la responsable.
Intégration cloisonnée au CMS
"Notre principale contrainte était de faire en sorte que rien ne sorte du groupe : nous devons rester souverains, nous ne souhaitons pas que nos contenus entraînent les modèles", explique Violaine Degas. Pour cela, les équipes utilisent la technique du RAG (génération augmentée de récupération), qui permet d'entrainer un LLM à une base de connaissances spécifiques, par exemple interne à une organisation. Un modèle semblable et qui a beaucoup inspiré nos interlocuteurs est GenIA-L, développé par Lefebvre Dalloz. "Notre base reste chez nous", résume l'experte.
Pour le moment, le modèle d'IA choisi est GPT-4 d'OpenAI. "Nous le faisons à travers notre plateforme Azure, qui elle-même héberge notre CMS. Mais rien ne nous empêche de choisir demain un autre modèle, un Mistral ou un Gemini par exemple, si besoin. Cela pourra se faire très facilement", commente Benoît Georges. "Cette liberté de pouvoir brancher à tout moment à notre CMS n'importe quel modèle de langage est très importante pour nous."
Il était également fondamental pour nos interlocuteurs de faire en sorte que les journalistes gardent le contrôle sur tout : l'IA est là pour aider et suggérer mais pas pour faire à la place de la rédaction insistent-ils. C'est pourquoi, afin notamment que les résultats soient pertinents, les prompts ont été réalisés et itérés par un petit groupe de journalistes et de community managers avant une phase de tests avec une vingtaine de professionnels de la rédaction qui s'est étalée durant le dernier trimestre de l'année, juste avant la "mise en production" en janvier. "Dans les prompts nous avons défini tout ce qui fait la spécificité des Echos", ajoute Benoît Georges.
Et concernant l'image et l'audio ?
Nos deux interlocuteurs écartent toute possibilité pour le moment d'adopter la génération d'images avec l'IA en estimant que les modèles disponibles à cette fin ne garantissent pas le respect de la propriété intellectuelle. "Notre métier étant de montrer les faits, la réalité, il serait compliqué pour nous de faire appel à l'IA générative. Nos images, nous devons pouvoir les tracer, les sourcer, en connaître les droits correspondants, ce qu'aucun outil ne permet. C'est aussi pour cela qu'il est fondamental que nous nous appropriions ces sujets tout en les sécurisant en fournissant un cadre. C'est la meilleure manière d'éviter le revers de la médaille des plus enthousiastes qui, faisant trop confiance à l'IA, ont tendance à tester n'importe quel outil externe à l'entreprise pour les assister dans la production de leurs contenus", insiste Benoît Georges.
Concernant l'audio, le journal a recours à une fonctionnalité de text-to-speech, mais uniquement dans le cadre de 'La playlist de l'actu', disponible pour ses abonnés sur l'application.
L'IA générative pour la recherche d'informations
L'utilisation des moteurs d'IA générative pour la recherche d'informations n'est pas encouragée pour des questions de fiabilité. En revanche, l'application consistant à permettre ChatGPT d'interroger les archives des Echos exclusivement est déjà à l'étude. Dans le groupe, il est possible d'interroger les archives d'Historia : le département data a développé un outil qui utilise comme modèle Gemini et comme base les 22 000 articles d'archives de la publication. Chaque réponse à une requête affiche les articles qui ont servi de source. L'outil est toujours en phase de test.
Le recours à la version sécurisée de ChatGPT pour interroger des documents précis très volumineux est également en phase exploratoire.
Quant à la question de savoir si le groupe envisage un jour de signer des accords-cadres avec des fournisseurs, à l'instar du Monde, la réponse est catégorique : "Nous ne souhaitons pas que nos contenus viennent entraîner des modèles. Il est très important pour nous de rester souverains", conclut Violaine Degas
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